Abstract
Dans la galaxie des Entiers Naturels, les Nombres Premiers ont la caractéristique de n’être divisibles que par 1 et par eux même. Cette particularité, simple de premier abord, ne permet pas pour autant de prédire leurs positions cardinales dans la suite des nombres entiers naturels.
Dans la suite infinie de nombres, nous savons les Nombres Premiers également en quantité infinie, bien que de plus en plus rares au fur et à mesure que l’on avance dans la suite des entiers — chaque nouveau Nombre Premier étant à son tout un diviseur pour les nombres postérieurs, les places libres pour de futurs Nombres Premiers s’amenuisent de fait. Disséminés en apparence de façon chaotique et totalement irrégulière, leurs positions dans la suite des Entiers Naturels ne semblent répondre à aucune logique évidente.
A ce jour, aucun théorème mathématique, autrement dit aucune règle démontrée et irréfutable, ne permet de prédire la position des Nombres Premiers avec certitude dans la suite des Entiers. Pour les déterminer, les seules méthodes utilisées le sont sur la base de conjectures parcellaires, lesquelles relèvent soit d’une approche statistique, probabiliste, ou d’opération de criblages. Si les deux premières donnent des résultats fins, et en apparence fiables par le biais d’opération mathématiques pointues (fonction Zeta de Riemann), elles restent à ce jour incertaines, car non démontrées. Quand aux méthodes de criblage, sortes de tamis consistant à éliminer d’une liste tous les facteurs générés par les Nombres Premiers inférieurs, si elles ont le mérite de l’exactitude, elles ont le fâcheux défaut d’être exponentiellement gourmandes en calculs au fur et à mesure que la recherche avance dans la liste des entiers et porte sur de très grands nombres — au point de mettre à mal même les calculateurs les plus puissants disponibles à ce jour.
Ce problème de prédiction des emplacements des Nombres Premiers dans la suite des Entiers Naturels, sur lequel bute les meilleurs esprits en la matière, fait parti des 10 défis du millénaire non encore résolus par la communauté des mathématiciens.
Travaillant sur un médium digital, en programmation numérique, il me semblait pertinent d’aborder cette énigme mathématique principalement sous l’angle de la représentation, et de tenter d’en dresser une cartographie symbolique, radicale autant qu’esthétique, pour esquisser un horizon conceptuel et sensoriel autant récréatif que potentiellement opérationnel. A l’ère du Big Data, et de la recherche scientifique fortement tributaire des biais de la statistique, des calculs intensifs, et de la manipulation massive de grandes quantités de nombres sur de vastes territoires d’interactions, il me semblait aussi salutaire de sonder la nature de ces paysages abstraits, souvent arides, et d’en rechercher une représentation sensorielle et générative pour nourrir ses racines imaginaires.
Ces travaux explorent différentes modalités de visualisation et de cartographies des Nombres Premiers dans la suite des Entiers naturels, à la recherche de motifs ou de symétries fines, susceptibles de survenir en jouant avec ces nombres particuliers.
1.

Cartographie des Nombres premiers de 1 à 1.000.000
Sur un carré de 1000 x 1000 pixels, chaque pixel blanc représente un Nombre Premier, les pixels noirs des Entiers naturels divisibles par un ou plusieurs nombres autres que 1 ou lui-même.
Image générée selon une méthode de crible (les facteurs sont « éteints » un par un par le programme), en prenant en compte la liste des Nombres Premiers connus de la première ligne (soit inférieurs à 1.000, √1.000.000). L’agencement des nombres se lit de gauche à droite, et de bas en haut.
2.

Carte des Nombres premiers de 1 à 4.000.000
Chaque point blanc représente un Nombre Premier placé dans la suite des Entiers Naturels, sur une surface de 2.000 x 2.000, soit une cartographie de tous les Nombres Premiers < 4.000.000.
L’ensemble des Nombres Premiers est encore dense, mais l’agencement (base 10, modulo 2.000) souligne des variations de densité qui laissent apparaître des zones plus ou moins régulières, lesquels tendent à s’ordonner selon un schéma ordonné.
3.

Carte des Nombres premiers de 1 à 1.000.000
Recherche de crible assymétrique — les points blancs représentent les nombres premiers persistants après un filtre éliminant tous les nombres symétriques (modulo 1.000)
3.b

Agencement des Nombres Premiers sur une parcelle de 512 x 512 (soit sur une carte des Entiers Naturels de 0 à 262.144)
4.

Positions cardinales des nombres premiers, facteurs des entiers naturels postérieurs, par tranche de 1000 nombres (section et profondeur). La carte se lit de gauche à droite. Chaque point blanc marque un diviseur, tel qu’il apparait dans la série des Entiers naturels. Sa première position est ainsi un Nombre Premier, qui devient par la suite diviseur pour tous les nombres suivants. L’axe des X correspond à la suite des Entier Naturels. L’offset détermine le début de la séquence (ici, la valeur est « 0 », soit une séquence de 0 à 1000). L’axe des Y rassemble les diviseurs en incrémentation directe pour les 1000 premier Nombres Premiers. Autrement dit, chaque nouvelle ligne marque l’arrivée d’un Nombre Premier dans la séquence des Entiers, et ancre sa position à la suite dans une séquence de criblage. L’apparition de tout Nombre Premier dans cette suite nécessite ainsi une colonne de 1 pixel parfaitement libre, sans aucun point blanc en vertical (place laissée vacante par le crible). Une coloration bleue a été ajoutée, ainsi qu’une progression de luminosité, afin de rendre visible l’attraction progressive des diviseurs, et de pouvoir observer leurs combinaisons rythmiques à différentes échelles plus facilement. Cette représentation souligne les ondulations de phase que les Nombres Premiers entretiennent entre eux une fois devenus diviseurs.
Ces cartes ont ceci de particulier qu’elles dessinent clairement les « vagues » que la suite des Nombres Premiers génèrent dans l’Océan des Entiers Naturels.
A l’image des surfaces marines, mais sans les aléas supplémentaires du vent, les clapotis sur le rivage concentrent une densité d’interactions à partir de laquelle il est difficile d’appréhender l’incidence des vagues lointaines. D’où leur apparent comportement chaotique. Inversement, plus l’observation des combinaisons de diviseurs porte sur des grands Nombres Premiers, avec peu d’effets sur le rivage, plus ces vagues deviennent amples et posées, et révèlent des résonances qui se combinent entre elles à grande échelle. Sur un autre plan, les incidences des Primorielles, lesquelles permettent d’établir des règles de symétrie parfaitement prédictives, deviennent également plus perceptibles.
Travaux réalisés en programmation Java.
Atlas des Nombres Premiers de 0 à 1.000.000 + Séquences vidéo de visualisation dynamique (navigation dans l’atlas);
4.b

offset : 10.000. Soit une carte des 1000 premiers facteurs (en blanc), pour les nombres compris entre 10.000 et 11.000
3.c

offset : 4.550 ; Carte des 1000 premiers facteurs (en blanc), pour les nombres compris entre 4.550 et 5.550.
Carte centrée sur 5050, soit la Primorielle des 10 premiers Nombres Premiers.
3.d

offset : 100.000 ; Soit une carte des 1000 premiers facteurs (en blanc), pour les nombres compris entre 100.000 et 101.000.
3.e Résonance aux voisinage de 1.000.000

5. Recherche de symétrie par colorimétrie.




6. Visualisation chromatique du crible d’Eratosthène.
Carte de 1000 x 1000 pixels. Soit un crible en base 1000 (ou modulo 1000), généré à partir des seuls Nombres Premiers compris entre 0 et 1000, efficient pour tous les Entiers Naturels compris entre 1 et 1.000.000.
NB: la suite des nombres se lit de gauche à droite, et du haut vers le bas.

7. Essais de visualisations de cribles partiels.
Recherche d’optique (filtre par luminosité), pour la fabrication d’un télescope d’observation des très grands Nombres Premiers dans la Galaxie des Entiers Naturels.








